Homélie du 5 janvier 2025 - Epiphanie C - Fr Henri
La première lecture, tirée du livre de Néhémie, nous met en présence des rescapés de l’exil à Babylone qui se rassemblent autour de la Parole de Dieu dans le but de redécouvrir l’enracinement de leur foi. C’est exactement ce que nous faisons ce matin dans cette première partie de la messe qu’on appelle « liturgie de la Parole »… Ces exilés qui sont de retour, en entendant les Saintes Écritures, en écoutant les explications que les prêtres étaient chargés de donner, comprennent tout-à-fois la grandeur du don de Dieu aux hommes, leur propre identité et la bonté du Seigneur pour tous…
Cette première lecture est pour nous aujourd’hui une invitation à donner toute sa place à l’Écriture-Sainte dans notre vie spirituelle. Lui donner « toute sa place » cela suppose de ne pas se contenter de l’écouter mais de la lire à la fois dans un dialogue personnel avec le Seigneur, mais aussi au sein de la grande communauté de l’Église que nous formons.
La deuxième lecture, celle de saint Paul aux chrétiens de Corinthe, nous parle justement de l’Église. St Paul nous explique que l’Église n’existe que par le Christ, qui est son Seigneur et son Dieu. Il nous rappelle que c’est Jésus lui-même qui a voulu que l’Église soit son corps. Et c’est bien parce qu’elle est le corps du Christ que l’Église tire son unité, non pas d’un organigramme bien fait, mais de l’action de l’Esprit Saint.
Ce qui fait que, en tant que membres du Corps du Christ nous vivons dans une belle dépendance envers Dieu et les uns envers les autres. C’est un peu comme dans un orchestre. Ici, le chef d’orchestre c’est le Seigneur et nous sommes les instruments de l’orchestre. Tous les instruments sont indispensables à la belle symphonie de Dieu…y compris les plus petits et les plus discrets… nous n’avons pas à chercher à nous comparer. Nous sommes tous et chacun d’une importance unique en tant que membre de l’unique Corps du Christ dont il est la tête.
Arrêtons-nous maintenant sur l’Évangile de St Luc. Luc nous rappelle qu’à l’origine de la composition des textes du Nouveau Testament il y a d’abord eu les témoins oculaires de la vie de Jésus et les serviteurs de sa Parole. Puis il y a eu ceux qui ont composé un récit des évènements en fidélité à la transmission de ces témoins oculaires. Il nous précise que de son côté il a pris soin, lui aussi, de s’informer de tout depuis les origines pour en écrire un exposé suivi destiné à Théophile afin qu’il puisse faire l’expérience de la solidité des enseignement qu’il avait reçus depuis les origines.
Ensuite nous passons directement du chapitre 1 au chapitre 4, celui du retour de Jésus en Galilée. Luc précise que le principal acteur de ce retour de Jésus en Galilée c’est l’Esprit-Saint. Puis il nous décrit, à la façon d’un cinéaste, Jésus qui entre dans la synagogue de Nazareth le jour du sabbat et qui se lève pour faire la lecture. Le livre du Prophète Isaïe lui est présenté. Il l’ouvre et trouve le passage où il est écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils sont libres, et aux aveugles qu’ils verront la lumière, apporter aux opprimés la libération, annoncer une année de bienfaits accordée par le Seigneur.
Il referme le livre et leur dit : « Cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit. » En parlant ainsi, Jésus annonce non seulement que l’attente messianique du peuple est exaucée, mais surtout qu’il est lui-même l’accomplissement de cette attente.
Cet « Aujourd’hui » de l’accomplissement des promesses de Dieu en Jésus prononcé fait écho à l’ « Aujourd’hui » du jour de Pâques. Cet « aujourd’hui » est la meilleure Bonne Nouvelle que nous puissions entendre. Cet « aujourd’hui » nous annonce une parole de bénédiction que Jésus vient réveiller et ressusciter en sa personne. Cette parole n’est pas une parole de jugement et de condamnation, mais une parole de Vie et d’espérance, une parole qui nous dit que « La joie du Seigneur est notre rempart et qu’elle est notre force ». Prions…
Seigneur, donne-nous d’accueillir l’Esprit-Saint qui a reposé sur toi et que tu nous donnes pour qu’à notre tour nous proclamions par toute notre vie la Paix et la Joie, la Bonne Nouvelle de ton Évangile, Amen
Brive, Saint-Antoine, 26 janvier 2025 Fr Henri Namur, ofm
Frères et Sœurs, fêter l’Épiphanie, c’est, comme ce mot d’origine grecque l’indique, fêter un dévoilement. Ce qui nous est dévoilé aujourd’hui, c’est la gloire de Dieu dans son humilité. Une lumière, sous la forme d’une étoile, vient nous visiter.
Cette lumière qui guide les Mages, Isaïe la contemplait déjà : « Debout, Jérusalem, resplendis ! Elle est venue, ta lumière et la gloire du Seigneur s’est levée sur toi. » (Is 60,1)
Dans la nuit de Noël, c’était la voix de l’Ange qui conduisait les bergers vers le nouveau-né, dans l’évangile d’aujourd’hui c’est une étoile qui conduit les Mages : dans un cas comme dans l’autre c’est toujours Dieu qui nous guide, soit par son ange, soit par sa lumière…
Ces Mages, dont le texte de l’évangile ne dit pas qu’ils sont trois, représentent tout homme en recherche de Dieu, hier comme aujourd’hui. En fait, toute personne qui désire progresser dans la connaissance de la vérité, accomplit un chemin identique à celui des Mages. En effet les Mages ne connaissaient pas la Révélation biblique et pourtant ils finissent par trouver l’enfant. Ainsi en est-il pour ceux qui ne connaissent pas Dieu mais qui cherchent honnêtement. Dieu sait combien à Saint-Antoine, nous rencontrons nombre de ces personnes en recherche… ! Si une telle aventure est possible pour les nombreuses personnes qui, aujourd’hui ne connaissent pas Dieu, c’est bien parce que Dieu a créé l’homme à son image, et que cette image de Dieu qui repose au plus profond d’elles vient éveiller un fort désir de le rencontrer. Ces mages représentent donc toutes les nations païennes qui viennent se prosterner devant leur Sauveur.
Sortons, nous aussi à la rencontre de ces personnes qui viennent d’horizons si divers. Cheminons amicalement avec elles dans la connaissance du Christ. Ne cédons pas à l’habitude, secouons notre foi pour la réveiller et chercher cette étoile qui nous indique le lieu de la manifestation plénière de l’Amour de Dieu, le lieu de l’Incarnation du Fils.
Nous le savons, la lune exerce une influence les marées, et pas seulement sur elles ! Combien plus l’étoile de l’Épiphanie a-t-elle la puissance de nous mettre en mouvement , elle aussi, pour adorer en tout temps et en tout lieu Celui qui est la lumière de nos vies. Aujourd’hui, c’est l’Esprit-Saint qui nous pousse à sortir de nous-mêmes pour nous mettre en quête de Jésus présent en toute personne, notamment les petits et les pauvres en quête d’amour…
Comme les Mages, sachons nous aussi déposer aux pieds de l’enfant de Noël la myrrhe de nos vies, c’est-à-dire notre espérance dans les épreuves ; Avec 2025 nous sommes justement entrés dans l’année jubilaire dont le thème est l’Espérance ; Après la myrrhe, déposons aux pieds de l’enfant l’encens de nos vies, c’est-à-dire notre foi par laquelle nous vivons sous le regard de Dieu ; enfin, déposons aux pieds de l’enfant l’or de nos vies, c’est-à-dire notre charité qui est une voie supérieure à toutes les autres et qui a donc une plus grande valeur que l’or… ! Voilà ce que Dieu attend de nous. Amour, compassion et pardon ont plus de prix à ses yeux que les plus riches trésors…
Enfin, de même que les Mages ont été avertis en songe de prendre un autre chemin que celui qu’ils avaient prévu, osons quitter nous aussi nos propres chemins pour emprunter ceux que le Seigneur ouvre devant nos pas… Osons la rencontre de l’autre différent… Soyons des hommes et des femmes qui osent se laisser dérouter, guider et transformer par Celui qui est la lumière…Une lumière qui éclaire et suscite nos choix, nos prises de parole, le don de nos vies : c’est seulement ainsi que nous serons des témoins pour ceux qui ne connaissent pas Dieu mais qui le cherchent…
Grâces soient donc rendues à Dieu en ce dimanche de l’Épiphanie car « Désormais, par l’annonce de l’Évangile, ce sont toutes les nations qui sont associées au même héritage, au même corps et au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus ». Prions :
Seigneur, donne-nous d’annoncer ton Saint Évangile en commençant par nous laisser illuminer par Toi et donne-nous d’être, dans notre vie, un reflet de Ta lumière pour le Bien de tous,
Enfin, emplis-nous de ton Esprit-Saint, afin que, nous soyons de bons guides pour conduire vers Toi celles et ceux veulent découvrir le Maître et Seigneur de nos vies couché dans la crèche, mort sur la croix et resuscité, Amen.
Brive, Saint-Antoine, le 5 janvier 2025 Fr. Henri Namur, ofm
Frères et Sœurs, le verbe qui me vient pour exprimer le souffle qui parcourt les trois lectures de ce jour… c’est « ESPÉRER » … espérer contre toute espérance.
Pourquoi une telle espérance ? Tout simplement parce que ces trois lectures nous montrent que le Royaume de Dieu est une force qui avance au milieu de nombreuses difficultés et que, ce Royaume, rien ne peut l’arrêter.
Cette force du Royaume de Dieu elle est à l’œuvre dans la première lecture du prophète Ézéchiel. Les habitants de Jérusalem sont déportés, loin de chez eux… Cet exil nous fait penser à bien des situations contemporaines… C’est à ce peuple désemparé qu’Ézéchiel annonce que rien n’est perdu. Pour les faire entrer dans cette espérance il utilise une parabole dans laquelle Dieu prend un jeune rameau à la cime du grand cèdre pour le planter lui-même sur la haute montagne d’Israël. Par cette image il leur fait comprendre que ce qui n’est qu’une minuscule bouture, le petit reste d’Israël en exil, va germer et devenir un grand arbre. Cela redonne courage et espérance aux exilés. Dans la lumière du Christ, c’est une façon de nous faire comprendre que la haine, la violence et le mal ne peuvent avoir le dernier mot. C’est bien l’amour qui triomphera.
C’est cette même espérance, nous la voyons à l’œuvre dans la deuxième lettre de Paul aux chrétiens de Corinthe. Alors qu’il rencontre lui-même de nombreuses difficultés dans son ministère, Paul a la ferme certitude qu’à travers ces difficultés c’est en fait la vraie vie qui est en train de germer, la vie du Royaume. Et il ajoute que le Seigneur donnera la couronne de gloire à ceux qui auront accompli leur course jusqu’au bout. Ce message de réconfort nourrit, lui aussi, notre espérance au cœur même de nos difficultés car nous savons que si nous restons reliés au Christ, alors rien ne nous séparera de son amour.
Bien-sûr, l’Évangile de Marc « booste » lui aussi notre espérance. Il le fait en nous invitant à la patience qui est le propre du Royaume de Dieu. Cet évangile nous fait comprendre que le Royaume, déjà là mais encore à venir, est un Royaume en gestation. Il est comme cette semence qui germe et grandit toute seule. Entre le moment où elle est semée et celui de la récolte il se passe beaucoup de temps. C’est là pour nous une forte invitation à ne pas rester le nez collé sur les malheurs du monde mais à relever la tête pour voir plus loin et agir avec l’Espérance que Dieu nous donne.
Si Jésus précise que cette semence, est “la plus petite des semences de la terre”. C’est pour nous placer devant la logique même du Royaume qui veut que ce qui est folie aux yeux des hommes est sagesse de Dieu, et « ce qui est insignifiant, voilà précisément ce que Dieu a choisi pour confondre ce qui est fort… » Seul l’élan de notre foi peut nous faire entrer dans cette logique du Royaume et nous permettre de reconnaître cette action discrète de Dieu dans notre monde.
Comme les disciples d’Emmaüs, laissons Jésus marcher à nos côtés afin qu’il nous explique les Écritures et nous partage son pain eucharistique. C’est seulement ainsi que, nous aussi, nous passerons de la désespérance à cette espérance qui rend le cœur tout brûlant… ! Alors nous pourrons deviner les semences du Royaume à l’œuvre dans nos vies et celle du monde… Entrer dans une telle perception, ce n’est pas être naïf mais c’est tout au contraire être solidement ancré dans la logique du Royaume qui veut que la plus petite des semences grandit on ne sait comment pour finir par dépasser toutes les semences de la terre.
En attendant la moisson, soyons patients et confiants. Car, comme le dit Paul dans la 1Co, « Ce n’est pas celui qui plante qui est quelque chose, ni celui qui arrose, mais celui qui donne la croissance, à savoir Dieu » (1 Co 3,6-7).
Seigneur, donne-nous d’accueillir dans la terre meuble de notre cœur Celui qui est la semence du Père des Cieux, notre Seigneur Jésus-Christ afin que sa parole germer en nous.
Seigneur, tu t’es fait, par pur amour, le plus petit d’entre nous et, par ta résurrection, tu as anéanti la puissance de la mort, du mal et du péché. Nous levons les yeux sur ta croix car elle est notre seule Espérance. Que ta soit croix plantée dans la terre de notre humanité afin que nous devenions ce grand arbre où les petits, les exclus et les laissés pour compte viendront faire leur nid, Amen…
Brive, Saint-Antoine,
16 juin 2024
Fr. Henri Namur, ofm
En ce jour de la Pentecôte, l’Église tout entière reçoit un double don : d’abord, celui de la plénitude de vie qui est en Dieu et ensuite, celui de la communication.
1) L’Esprit est plénitude de vie car il est l’Animateur de la vie de l’Église, il souffle où il veut la vie de Dieu et son appel…, il fait toutes choses nouvelles !
2) L’Esprit est un grand communicant et un grand communicateur car il nous ouvre à la relation selon le cœur de Dieu. Il nous donne d’entendre la langue de l’autre. Avec l’ES ça communique « à tous vents ».
Quand Jésus, dans l’Évangile de Saint Jean, nous promet l’Esprit-Saint, il ajoute que c’est cet Esprit-Saint qui rendra témoignage en sa faveur et qui nous guidera vers la vérité tout entière. Cette Vérité, c’est Jésus lui-même : aller vers la Vérité, faire la Vérité, c’est aller à Jésus, c’est nous laisser habiter par lui. C’est ce qui s’est passé au jour de la Pentecôte. Les Apôtres furent remplis de l’Esprit Saint. Ce fut pour eux une expérience semblable à celle d’un grand vent du large s’engouffrant dans la maison où ils étaient rassemblés. Ils furent poussés à sortir pour témoigner de cette Vérité qu’ils recevaient sous forme de langues de feu…
Ce qui nous est rappelé aussi dans ce même évangile, c’est que l’ES est aussi notre défenseur contre l’Adversaire au cœur des tribulations de ce monde…
Expert en pédagogie divine, l’Esprit met en œuvre en nos propres vies la vie même de Jésus Ressuscité. Invisible et insaisissable, l’ES est impossible à décrire ! C’est seulement dans son action et dans ses fruits qu’il se manifeste et que nous pouvons le percevoir.
On peut dire de l’ES qu’il est l’entraîneur ou le coach de notre vie spirituelle. C’est avec lui que nous pouvons mener jusqu’au bout la course de fond qu’est l’Évangile. Pour cela, il nous donne l’intelligence des Écritures, il nous en ouvre les mots... Il prend pour nous ce qu’il y a dans le Père et en Jésus pour nous le faire connaître. C’est le propre de l’Esprit, que de savoir non seulement ce qu’il y a en Dieu, mais de vouloir aussi ce que Dieu veut. C’est pourquoi, comme le dit frère François d’Assise, nous devons sans cesse, « demander d’avoir l’Esprit du Seigneur et sa Sainte opération et le laisser agir en nous ».
Fils authentique de l’Église, Saint François, ira jusqu’à écrire dans sa Règle que le véritable Ministre Général de l’Ordre, c’est l’Esprit-Saint à qui tous les autres Ministres sont soumis…ajoutant même qu’un frère n’est pas tenu à l’obéissance si un Ministre lui donne un ordre qui soit contraire à l’Esprit-Saint. Le message est clair : les structures et les Règles sont ordonnées à l’amour de Dieu et des hommes et c’est seulement ainsi qu’elles servent l’action de l’Esprit-Saint ! L’ES est vraiment Celui qui vient parachever en nous l’amour de Dieu en le menant à sa perfection.
Saint François dit même que « Puisque Dieu est Esprit, on ne peut le voir que par l’Esprit ». C’est ce même Esprit qui a donné au petit pauvre d’Assise ce regard du cœur qui permet de voir et rencontrer le Christ en toute créature et dans toute la création.
C’est encore à l’Esprit-Saint que François attribue son goût pour les lieux de solitude, ces lieux où il reçoit la visite de l’Esprit et ses instructions. Ce fut la même expérience pour Saint Antoine, y compris ici à Brive …
Je termine avec une dernière image que j’emprunte au monde artisanal. Comme disait les anciens avec admiration face au travail d’un artisan : « c’est du bel ouvrage ! » Ce qui veut dire que, dans l’œuvre produite ce qu’ils contemplaient c’était les qualités professionnelles et humaines de l’artisan. Un artisan, digne de ce nom, articule toujours en même temps l’utile et le beau. C’est justement à un artisan que St Bonaventure compare le Saint-Esprit. Il dit que l’Esprit-Saint est « le grand artisan des œuvres du Père et du Fils ». Le mérite d’une telle comparaison c’est de permettre à tous ceux qui ont du mal avec la notion d’Esprit-Saint d’en avoir une approche concrète… C’est bien dans ses œuvres et ses fruits que l’Esprit se manifeste et que nous pouvons en faire l’expérience…
Seigneur, nous te rendons grâce pour le don de l’Esprit-Saint. Que son souffle, ouvre nos cœurs à l’intelligence des Écritures et au mystère que nous célébrons dans cette Eucharistie. Puisque « l’Esprit nous fait vivre », conduis-nous par ton Esprit-Saint. Ainsi, tout rempli d’enthousiasme, de courage et de passion nous pourrons, jusque dans le don de nos vies, annoncer à toute créature et à toute la création ton Saint Évangile, la Bonne nouvelle de ton amour miséricordieux pour tous les hommes, Amen !
Brive, Saint-Antoine,
19 mai 2024
Fr. Henri NAMUR, ofm
Je suis assez sensible à ces images de vigne et des sarments que Jésus nous donne pour nous parler du lien vital que nous avons à entretenir avec lui. Quand j’étais enfant, c’était une joie pour moi d’accompagner mes parents au moment de la taille de la vigne parce que ma tâche consistait à ramasser les sarments coupés pour les transporter en bout de route et les faire brûler sur un grand feu… Cela me fascinait… mais j’étais loin, à l’époque, de penser à la parabole de Jésus…
S’il fallait rassembler les lectures de ce jour autour d’un seul verbe, je choisirais volontiers « porter du fruit » … Je dis cela parce que, depuis le début de la Création, ne sommes pas faits pour la stérilité… nous sommes appelés à être féconds.
Le récit du livre des Actes nous montre cette fécondité à l’œuvre dans la vie de Saint Paul. D’abord persécuteur des chrétiens, il est devenu le grand témoin de la foi. En lui, la grâce de Dieu n’est pas demeurée stérile. La Bonne nouvelle a été annoncée aux nations païennes. St Paul témoigne que la source de sa fécondité missionnaire c’est bien son attachement au Christ au point qu’il pourra s’exclamer « pour moi, vivre, c’est le Christ ».
Dans l’Évangile de saint Jean, Jésus se présente à nous comme “la vraie vigne”, le Père est le vigneron et nous, nous sommes les sarments. Parler ainsi, de la part de Jésus, c’est prendre soin de nous.
Il y a un fort point d’insistance de la part de Jésus dans cette parabole. Sept fois de suite Jésus nous presse de demeurer en lui. C’est une belle façon de nous faire comprendre que notre fécondité dépend de notre communion à son cœur, à ses Béatitudes. Le passage obligé pour porter un fruit qui soit le sien, c’est de demeurer en lui. Jésus veut nous prévenir du risque de nous éloigner de lui et de finir tout desséchés comme le sarment stérile qui n’a plus qu’à finir au feu.
La question pour nous ce matin c’est donc de savoir comment demeurer en Jésus Ressuscité à la façon du sarment sur le cep de vigne ?
Trois chemins s’offrent à nous pour cela : 1) Le premier chemin pour demeurer dans le Christ, c’est la Parole de Dieu et la prière. Demeurer dans la Parole, c’est nous donner du temps pour l’accueillir et pour laisser l’ES faire patiemment en nous l’œuvre du Père et du Fils. Ce temps de la patience, c’est celui de notre conversion, un temps où, comme le sarment, nous nous laissons émonder, tailler, purifier afin de produire un fruit de plus en plus généreux dont le Seigneur seul est la fécondité.
Demeurer en présence du Seigneur dans la prière, c’est lui parler, l’écouter, s’entretenir avec Lui afin de rester greffés sur Lui. Pour le dire autrement, la prière nous aide à maintenir en nous l’évangile en état de marche…
2) Deuxième chemin pour demeurer étroitement greffé sur Jésus, ce sont les sacrements, en particulier l’Eucharistie dont découlent les autres sacrements et qui est source et sommet de toute vie chrétienne et de toute évangélisation. L’Eucharistie nous donne de demeurer dans le Seigneur parce que, dans ce Mystère, nous faisons corps avec lui. Nous communions à son amour pour en vivre dans notre vie de tous les jours.
3) Le troisième chemin pour demeurer dans le Christ, c’est précisément celui de la vie de tous les jours. L’Eucharistie nous envoie dans le monde afin de l’aimer, ce monde, à la façon du Seigneur. Vivre dans le monde en aimant comme le Seigneur aime, cela ne se peut sans que notre bon jardinier émonde en nous tout ce qui pactise avec l’esprit du monde … !
La « communion » eucharistique nous donne de vivre le lien étroit qui unit le sarment à la vigne. On peut vraiment dire que nous sommes là en plein dans l’articulation de la liberté (la nôtre) et de la grâce (qui vient de Dieu) et du fruit qui en découle…
Alors, comme St Jean nous y invite, « aimons donc par des actes et en vérité » De tout cœur, demandons les uns pour les autres la grâce d’être vraiment unis, greffés au Seigneur Ressuscité afin que son Amour soit en nous source d’une fécondité qui s’épanouira jusque dans la vie éternelle… Enfin, comme nous le rappelle St François, veillons à ne pas nous approprier le Bien que Dieu fait en nous et par nous. Nous n’avons pour nous, en propre, que nos péchés, tout le reste est grâce de Dieu et fécondité pour notre vie et celle de nos frères et sœurs dans le monde, Amen.
Brive, Saint-Antoine,
28 avril 2024
Fr. Henri Namur, ofm
Après avoir entendu le récit de la Passion de notre Seigneur il conviendrait de n’ajouter aucune autre parole et d’entrer dans un silence méditatif. Mais l’Église recommande de prononcer une courte homélie…
Ce matin, à l’Office de Laudes, l’auteur de la lettre aux Hébreux nous rappelait que « le sang de notre Seigneur, versé sur la croix, purifie notre conscience des actions néfastes afin que nous puissions servir le Dieu vivant ». Effectivement, quand nous levons les yeux vers la croix de notre Seigneur, ce qui nous est révélé, c’est tout-à-la fois notre misère et notre péché mais aussi notre belle et grande vocation qui consiste à servir le Dieu vivant.
Ce n’est pas tout… La Croix de Jésus nous révèle aussi que la mort, que notre mort, n’est pas une impasse mais une Pâque. Et le Christ, dans sa Passion, inaugure pour nous ce chemin, ce passage, cette Pâque.
Dans l’épreuve de sa Passion, le désir profond de notre Seigneur c’est d’accomplir la volonté d’amour de son Père… C’est pourquoi, ainsi que l’écrit l’auteur de la lettre aux Hébreux, « Ainsi conduit à sa perfection, Il est devenu, pour tous ceux qui lui obéissent, la cause du salut éternel ».
Ce soir, offrons, nous aussi, notre vie au Christ, offrons-là maintenant et à l’heure de notre Mort. Avec St François, demandons au Seigneur : « la grâce de ne garder pour nous rien de nous, afin que nous reçoive tout entiers Celui qui, (ce soir), se donne à nous tout entier ».
Dans un instant nous allons nous avancer pour vénérer la Croix de notre Seigneur. Puisse, cette vénération, exprimer notre désir d’aimer Jésus plus que tout, lui qui est mort et ressuscité pour notre propre vie, Amen.
Vendredi-Saint 2024.03.29,
Église St Antoine de Brive
Fr. Henri Namur, ofm
« Revenez à Dieu de tout notre cœur » … Il faut bien avouer que c’est tout de même un peu fort que dans l’Alliance que Dieu fait avec son peuple, seul Dieu respecte le contrat ! Le peuple auquel Jérémie s’adresse a choisi de faire confiance à d’autres divinités ou à ses propres forces. Ce type de comportement est, ô combien, toujours d’actualité. Combien sont tentés aujourd’hui de se tourner vers d’autres dieux qui ont pour nom argent et recherche du pouvoir… ? Heureusement, le prophète Jérémie nous recentre sur l’essentiel, à savoir que le Seigneur mettra sa loi au fond de nous-mêmes, qu’il l’inscrira dans notre cœur et que c’est en nous tournant vers lui que nous trouverons le vrai bonheur. Cette initiative de Dieu envers nous qui sommes pécheurs est la source de notre espérance et de notre salut… !
Cette initiative de Dieu trouve son plein accomplissement en Jésus. Dans l’Évangile de St Jean nous voyons quelques Grecs qui arrivent à Jérusalem. Ils font savoir à Philippe qu’ils veulent « voir Jésus ». Philippe en fait part à André et tous les deux vont le dire à Jésus. Finalement, le bouche à oreille marche bien… ! Ces étrangers qui veulent « voir Jésus » nous font comprendre que la Bonne Nouvelle n’est pas réservée aux seuls membres du peuple de Dieu mais qu’elle est pour tous. Après tout, nous qui sommes présents dans cette église, ne sommes-nous pas venus, nous aussi, pour « voir Jésus » et ne sommes-nous pas, comme Philippe et André, chargés de présenter au Seigneur tous ces hommes et femmes de notre temps en quête de vérité qui viennent frapper à la porte de l’Église ?
Nous voudrions voir Jésus…En réponse à cette demande Jésus réagit d’une façon qui nous laisse quelque peu déconcertés… Il leur dit qu’ils le verront dans sa gloire. Pour ne pas être déroutés, nous aussi, il est bon de nous souvenir que la gloire dont il s’agit, c’est-à-dire « ce qui a du poids » en Jésus, c’est son amour mené jusqu’au bout de sa croix. Voir Jésus dans sa gloire c’est donc le voir sur la croix. C’est voir un homme comme les autres hommes, un homme bouleversé de perdre sa vie. Voir Jésus dans sa gloire, c’est voir la mort de Celui qui est l’auteur de la vie, le grain de blé tombé en terre et qui meurt, portant ainsi beaucoup de fruit. Voir Jésus dans sa gloire, c’est voir Celui qui est élevé au-dessus de tous et qui attire tous les hommes à lui. Chez St Jean, « être élevé » est le mot qui non seulement indique Jésus est élevé de terre sur sa croix mais aussi Jésus élevé au sens de ressuscité…
Quelle belle demande que celle de « vouloir voir Jésus », une demande à garder précieusement dans notre cœur et à répéter tout au long de nos jours et de nos nuits… Mais, à bien y réfléchir, n’est-ce pas lui, Jésus, qui voudrait nous voir… ? N’est-ce pas lui, Jésus, qui voudrait nous voir venir à lui afin de nous conduire à son Père ? Il faut bien reconnaître que nous sommes souvent loin de lui ; il faut bien constater que nous avons trop souvent l’art d’organiser notre vie en dehors de lui.
Or, ce Jésus que nous voulons voir, c’est dans les tout-petits qu’il est présent. En prenant soin de ces petits, c’est de Jésus que nous prenons soin.
Ce Jésus que nous voudrions voir c’est dans notre Église qu’il est présent dès lors qu’elle se fait pauvre, servante, proche et fraternelle aux couleurs du petit pauvre d’Assise…
Dans la célébration de cette Eucharistie, prions pour apprendre à connaître le Seigneur et à devenir des disciples selon son cœur. Comme nous le rappelle l’auteur de l’épître aux Hébreux : « Bien qu’il soit le Fils, il apprit par ses souffrances l’obéissance et, conduit à sa perfection,
il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent la cause du salut éternel ». Mourons donc à nous-mêmes comme le grain de blé tombé en terre ; mourons à la « tyrannie de notre cher moi », comme dit St François afin de porter un fruit qui soit celui de notre obéissance filiale au Seigneur. Laissons-nous attirer par Celui qui, du haut de sa croix, nous a tout donné et, pour le dire avec les mots de St François « Contemplons l’humilité de Dieu, faisons-lui l’hommage de notre cœur. Ne gardons pour nous rien de nous, afin que nous reçoive tout entiers, Celui qui se donne à nous tout entier. » Amen
Saint-Antoine, Brive
17 mars 2024
Fr. Henri Namur, ofm
Les trois lectures de ce dimanche ont un point commun : elles nous parlent toutes d’un fils. Dans la première lecture ce fils a pour nom Isaac. C’est le fils d’Abraham. Dans la seconde lecture, saint Paul nous parle du « Fils » que Dieu ne nous a pas refusé. Enfin, l’Évangile nous révèle le « Fils bien-aimé du Père ».
Dans le premier texte, Abraham se trouve devoir faire face à une épreuve terrible. Dieu lui demande de sacrifier son fils Isaac. Dans cette épreuve terrible, Abraham fait confiance à Dieu et c’est au dernier moment que l’Ange du Seigneur retient la main d’Abraham et lui dit « Je sais maintenant que tu crains Dieu, tu ne m’as pas refusé ton fils unique ».
La seconde lecture se présente comme une réponse à ce texte de la Genèse. Alors qu’Abraham a été empêché par Dieu de sacrifier son fils, saint Paul nous rappelle que Dieu, lui, au contraire, « n’a pas épargné son propre Fils mais il l’a livré pour nous. »
Dans l’Évangile, il est également question du « Fils » en la personne de Jésus qui emmène ses disciples sur une haute montagne. C’est le récit de la Transfiguration. La voix du Père s’y fait entende : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le ! « …C’est un peu comme le Père disait… aujourd’hui, vous voyez son visage transfiguré, dans quelques jours, vous le verrez défiguré. Écoutez-le. Faites-lui confiance quoi qu’il arrive… ».
On comprend les disciples. Témoins d’une telle Transfiguration, ils vivent une anticipation de la gloire qui attend Jésus après sa mort et sa résurrection. Pris dans cette lumière, ils auraient aimé s’installer dans ce bonheur en plantant trois tentes… Quand on est bien on aimerait que ça dure… ! Mais, voilà, ils ont beau regarder tout autour d’eux, il n’y a plus que Jésus seul avec eux.
En quoi cet Évangile vient-il illuminer et orienter notre Carême ? D’abord en nous rappelant que vivre le Carême c’est avant tout « écouter le Fils bien-aimé » ainsi que le Père nous le demande. Cette parole qu’il faut écouter, et qui est la même que celle que le Père a prononcée au baptême de Jésus, nous la trouvons chaque jour dans les Évangiles. C’est une parole qui nous apprend à voir les choses différemment…
Et puis, comme pour les trois disciples, Jésus nous invite à le suivre sur la « montagne » afin que nous prenions un peu de hauteur par rapport à nos soucis de tous les jours. C’est la raison pour laquelle nous sommes rassemblés dans cette église.
Enfin, les trois tentes dont nous parle le récit de la Transfiguration, c’est dans notre monde qu’il faut les planter car c’est là, au cœur de ce monde, que Dieu veut faire sa demeure. Quand St François d’Assise, au début de sa vocation, prend conseil auprès de Ste Claire pour savoir s’il doit se retirer dans la vie contemplative ou rester dans le monde, alors Ste Claire l’invitera à rester parmi les hommes. Ce que François traduira ainsi en s’adressant à ses frères : « notre cloître, c’est le monde ! » Vivre la vie contemplative dans le monde, voilà une belle façon d’y planter la tente de Dieu…
Cela étant, force est de constater que ce monde que Dieu veut habiter, ce monde où nous vivons, se trouve défiguré par les guerres, les violences et l’intolérance. Nous sommes dans un monde où les pauvres et les exclus sont de plus en plus nombreux. Eh bien, c’est précisément au cœur de cette dure réalité que Dieu compte sur nous pour lui construire une demeure digne de lui. Une telle entreprise suppose que nous commencions par lui faire une place privilégiée dans notre cœur en nous mettant à l’écoute de sa Parole et en convertissant nos manières d’être et d’agir pour qu’elles soient conformes à sa sainteté et bonté.
Cette Parole de Dieu, elle doit être le GPS, non seulement de notre Carême mais de toute notre vie. C’est sur nos visages que la blancheur et la beauté du Fils bien-aimé transfiguré doit pouvoir se lire car nous sommes appelés à devenir radieux comme le Christ. Là est le témoignage de notre Espérance.
Le seul chemin, donc, pour ressembler de plus en plus à Jésus, c’est de le suivre, d’écouter sa Parole et de la mettre en pratique. Ce chemin passe nécessairement par la croix qui convertit en nous tout ce qui a besoin de l’être mais, au bout du chemin, comme au bout de notre Carême, c’est la joie de Pâques qui nous attend, Amen.
Saint-Antoine, Brive
Dimanche 25 février 2024,
Fr. Henri Namur, ofm
C’est une immense espérance qui jaillit des lectures de ce dimanche. Une espérance qui naît de ce constat que Dieu est présent à nos vies en tant que libérateur. Dire de Dieu qu’il nous libère c’est reconnaître que nous sommes retenus en esclavage ou, pour parler le langage de l’actualité, « pris en otage » par un autre qui aliène nos libertés… C’est par sa parole puissante qui fait autorité que Dieu nous libère.
La première lecture nous rappelle le rôle du prophète. Un prophète, c’est celui qui écoute Dieu et qui explique ce qu’il a reçu de Lui ; Le rôle d’un prophète, c’est de faire comprendre que, malgré les apparences, Dieu est toujours là pour guider son peuple et l’enseigner. Le rôle d’un prophète, c’est surtout d’exhorter le peuple à écouter la Parole de Dieu. Écouter la Parole de Dieu, c’est bien ce à quoi nous appelle le Psaume 94 : « Aujourd’hui écouterez-vous sa parole ? Ne fermez pas votre cœur comme au désert, comme au jour de tentation et de défi. »
Il est aisé de constater que, lorsqu’on se coupe de l’écoute de la Parole de Dieu, ce sont souvent les superstitions qui se mettent à proliférer. Combien, parmi ceux qui rejettent la foi sous prétexte d’une liberté mal comprise, se mettent à courir derrière des voyants et des gourous en tous genres ? Or, c’est précisément de ce danger que le Seigneur veut nous prévenir. Il nous met en garde contre ces faux prophètes qui sont porteurs d’une parole qu’il ne leur a pas confiée … En Jésus, Verbe de Dieu, Parole faite chair, c’est une Parole d’autorité, bonne nouvelle pour nos vies, qui nous est donnée.
C’est cette Parole d’autorité que nous voyons à l’œuvre dans l’Évangile. C’est le jour du Sabbat, Jésus entre dans la synagogue et se met à enseigner. Les gens sont frappés par son enseignement car constatent-ils « il enseigne avec autorité et non pas comme les pharisiens ». Ce qui veut dire que dans les paroles humaines de Jésus les gens ressentent l’autorité même de Dieu. Quand Jésus parle, sa parole est comme celle de son Père.
À peine Jésus a-t-il fini d’enseigner qu’il se voit interpellé vivement par un homme possédé par un esprit mauvais. Ce qui est étonnant, c’est que cet esprit mauvais, en présence de l’autorité de Jésus, sait qu’il a déjà perdu la partie puis qu’il se met à crier en disant « Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. » Jésus, aussitôt interpelle cet esprit mauvais en lui disant avec autorité : « Silence, sors de cet homme ! »
Trois points importants à retenir pour notre vie spirituelle :
- Le premier, c’est qu’on ne discute pas avec le démon sinon, c’est lui qui a déjà gagné ;
- Le second, c’est qu’on ne peut pas lutter seul contre le Malin, nous ne pouvons le faire qu’avec Jésus, lui seul a autorité pour l’expulser ;
- Le troisième, c’est que notre cœur est fait pour devenir l’habitation du Seigneur. C’est la raison pour laquelle St Paul, nous exhorte « à rester attachés à Dieu sans partage ». Ce qui suppose de notre part de tout faire pour être fortement lié à Jésus afin d’être « délié », « délivré » du Malin…
Frères et sœurs, nous reconnaître en cet homme possédé, aliéné dans sa liberté d’enfant de Dieu, c’est le premier pas de notre conversion ! Oui, notre liberté et notre amour sont blessés et aliénés quand notre désir nous pousse à faire nôtre l’esprit du monde, l’esprit de vanité, l’attachement à l’argent, l’orgueil, et tout ce que nous connaissons fort bien dans l’expérience amère que nous faisons de de notre péché.
Être sauvé, c’est croire que nous sommes créés pour laisser la bonté de Dieu et sa sainteté habiter nos cœurs…
Dans notre participation à l’Eucharistie du Seigneur, demandons de tout cœur à Jésus de nous libérer de nos aliénations qui, si elles ne sont pas spectaculaires, n’en sont pas moins bien réelles. Redisons-lui notre foi en sa Parole d’autorité qui est bien plus forte que tous nos démons et qui nous rétablit dans notre belle dignité d’enfant de Dieu. Et puis, surtout, contemplons la croix de notre Seigneur : c’est sur elle que l’amour miséricordieux a triomphé du mal et que la vie a jailli en plénitude pour chacun d’entre nous… Amen.
Brive, le 28 janvier 2024
Fr. Henri Namur, ofm
Frères et Sœurs, fêter l’Épiphanie, c’est, comme ce mot d’origine grecque l’indique, fêter un dévoilement. Ce qui nous est dévoilé aujourd’hui, c’est la gloire de Dieu. Une lumière, sous la forme d’une étoile, vient nous visiter. Cette étoile, qui guide les Mages, est pour tous. La présence des mages est le signe de cette universalité.
Cette lumière, Isaïe la contemplait déjà : « Debout, Jérusalem, resplendis ! Elle est venue, ta lumière et la gloire du Seigneur s’est levée sur toi. » (Is 60,1) Alors que dans la nuit de Noël, c’était la voix de l’Ange qui conduisait les bergers vers le nouveau-né, dans l’évangile d’aujourd’hui c’est une étoile qui conduit les Mages : dans un cas comme dans l’autre c’est toujours Dieu qui nous guide, soit par son ange, soit par sa lumière…
Ces trois Mages représentent tout homme en recherche de Dieu. Toute personne qui désire progresser dans la connaissance de la vérité, accomplit un chemin identique à celui des Mages. En effet les Mages ne connaissaient pas la Révélation biblique et pourtant ils finissent par trouver l’enfant. Ainsi en est-il pour ceux qui ne connaissent pas Dieu mais qui cherchent honnêtement. Si une telle aventure est possible pour les nombreuses personnes qui, aujourd’hui ne connaissent pas Dieu, c’est bien parce que Dieu a créé l’homme à son image, et que cette image de Dieu qui repose au plus profond de l’homme vient éveiller en lui un fort désir de le rencontrer. Ces mages représentent donc toutes les nations païennes qui viennent se prosterner devant leur Sauveur.
Sortons, nous aussi à la rencontre de ces personnes pour cheminer avec elles dans la connaissance du Christ qui est Vie et Vérité. Ne cédons pas à l’habitude, secouons notre foi pour la réveiller et chercher cette étoile qui nous indique le lieu de la manifestation plénière de la Révélation de l’Amour de Dieu, le lieu de l’Incarnation du Fils.
C’est bien connu, la lune influence les marées, et pas qu’elles ! Combien plus l’étoile de l’Épiphanie a-t-elle la puissance de nous mettre en mouvement pour adorer en tout temps et en tout lieu Celui qui est la lumière de nos vies.
Accrochons-nous à l’étoile des Mages comme à un GPS ! Ici, le GPS, c’est l’Esprit-Saint. C’est lui qui nous conduit vers Celui que l’étoile de Bethléem indique.
Agissons comme les Mages, déposons aux pieds de l’enfant de Noël la myrrhe de nos vies, c’est-à-dire notre espérance dans les épreuves ; déposons aux pieds de l’enfant l’encens de nos vies, c’est-à-dire notre foi par laquelle nous vivons sous le regard de Dieu ; déposons aux pieds de l’enfant l’or de nos vies, c’est-à-dire notre charité qui est une voie supérieure à toutes les autres et donc de grande valeur.
Voilà ce que Dieu attend de nous. Amour, compassion et pardon ont plus de prix à ses yeux que les plus riches trésors… Là se trouve la vraie joie.
Enfin, de même que les Mages ont été avertis en songe de prendre un autre chemin que celui qu’ils avaient prévu, osons quitter nous aussi nos propres chemins pour prendre le chemin que le Seigneur ouvre devant nos pas… Soyons des hommes et des femmes qui osent se laisser dérouter, guider et transformer par Celui qui est la lumière…Une lumière qui éclaire et suscite nos choix, nos prises de parole, le don de nos vies : c’est seulement ainsi que nous serons des témoins crédibles pour ceux qui ne connaissent pas Dieu mais qui le cherchent…
Grâces soient donc rendues à Dieu en ce dimanche de l’Épiphanie. Désormais, en Jésus, lumière née de la lumière, tous les trésors qui sont dans le cœur de Dieu affluent désormais vers nous sans distinction de race ou de condition sociale. C’est bien ce que nous dit avec force et conviction St Paul dans l’Épitre aux Éphésiens : « Désormais, par l’annonce de l’Évangile, toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus ».
Soyons bien persuadés qu’annoncer l’évangile, c’est consentir à se laisser illuminer par Dieu et réfléchir sa lumière par notre témoignage de vie et nos choix. C’est cela être disciple-missionnaire.
Soyons donc des assoiffés de Dieu ; Comme l’étoile de l’épiphanie donnons à ceux qui nous entourent, à ceux vers qui nous allons, l’envie de se mettre en route eux aussi vers le Maître et Seigneur de nos vies couché dans la crèche, Amen.
Brive, le 7 janvier 2024
Fr. Henri NAMUR
S’il fallait choisir un seul mot pour qualifier ce premier dimanche de l’Avent je choisirais volontiers « Reviens ! » Cet impératif « reviens », dit à la fois notre péché et notre espérance. Notre péché, parce que c’est vrai que nous sommes prompts à partir ailleurs, loin de Dieu ; notre espérance, parce qu’il est toujours possible de revenir à notre Dieu ».
Mais il n’y a pas que nous qui pouvons revenir à Dieu, Dieu aussi vient à nous car il demeure fidèle à sa Parole de vie et d’amour pour nous. C’est pourquoi nous pouvons lui dire, en ce premier dimanche de l’Avent, Reviens Seigneur assouplir nos cœurs et les établir dans ta paix. Reviens ! Sors-nous de nos égarements afin que nous prenions appui sur toi et invoquions ton Nom. Reviens pour être notre force et notre espérance en ces temps de misère, de violence et de guerres ; Reviens parce que nous sommes l’argile et que c’est toi qui nous façonnes, nous sommes l’ouvrage de ta main, alors… Reviens !
Dieu ne cesse de venir à notre rencontre. C’est là qu’est la bonne nouvelle, une bonne nouvelle qui se trouve pleinement réalisée dans l’Incarnation de Jésus. Dans notre monde où sont à l’œuvre la misère sous toutes ses formes et le désespoir, nous sommes appelés à être le peuple de l’espérance à cause de Jésus qui est notre Espérance,
C’est pourquoi une des façons de vivre ce temps de l’Avent c’est de laisser l’esprit-Saint souffler sur les braises de notre foi afin que Jésus puisse naître chaque jour dans notre cœur.
Revenir à Dieu à l’occasion de ce temps de l’Avent, c’est se mettre dans les dispositions d’attendre le grand retour du Christ glorieux à la fin des temps. Dans cette attente, nous dit St Paul, il s’agit de tenir fermement jusqu’au bout en s’exerçant patiemment à l’accueil de la Parole Dieu avec au cœur le grand désir que la volonté du Père des Cieux s’accomplisse sur la terre comme au ciel, c’est-à-dire au cœur de toutes nos situations.
D’où l’insistance de l’Évangile de ce jour : « Veillez, prenez garde ». « Prendre garde » ne signifie pas « méfiez-vous ». Cela veut plutôt dire « prenez votre tour de garde », « veillez afin de voir venir », « exercez-vous pour le combat spirituel, le combat de la lumière » …
Elle est belle cette image qui nous invite à être comme le serviteur dévoué qui attend son maître en pleine nuit et qui est prêt à lui ouvrir la porte. C’est cela désirer Dieu de tout son cœur. Impossible de donner corps à ce désir d’accueillir le Seigneur en nos vies si nous ne sommes pas des hommes et des femmes passionnés par le mystère de Dieu et tout donnés à la joie de donner Dieu aux autres. C’est bien parce que nous serons des êtres de désir, des êtres habités par la miséricorde de Dieu que nous pourrons donner le goût de Dieu à nos proches et à nos concitoyens.
C’est tout cela être un veilleur. D’ailleurs, dans la Bible, le mot hébreu qui désigne le veilleur désigne aussi l’amandier. A première vue on peut se demander ce qu’il y a de commun entre un « veilleur » et un « amandier ». Pour comprendre il faut savoir que l’amandier fleurit avant tous les autres arbres. Il annonce le printemps. Veiller c’est donc être comme l’amandier, c’est se tenir aux avant-postes pour annoncer le printemps de Dieu qui vient à nous aujourd’hui comme hier et demain.
En ce temps de l’Avent, si nous ne faisons que changer de lunettes, nous aurons manqué le but. Ce ne sont pas nos lunettes qu’il faut changer mais notre regard : il s’agit de regarder comme Dieu regarde. C’est lui, et non pas le monde, qui est notre référentiel pour tout ce qui concerne notre vie et notre action en ce monde. Là est la conversion…
Ne laissons donc pas le sommeil nous gagner. Réveillons-nous et, loin des tapages publicitaires et des fébrilités mercantiles, accueillons dans le silence le Seigneur qui vient…
Seigneur, garde-nous éveillés pour que nous puissions t’apercevoir de loin et prendre appui sur toi. Ouvre nos yeux pour que nous ne rations pas les moments où tu viens frapper à la porte de notre cœur. « Dieu de l’univers, reviens, Jamais plus nous n’irons loin de toi ; fais-nous vivre et invoquer ton nom ! » Amen.
Brive, Saint-Antoine, le 3 décembre 2023
1er dimanche de l’Avent,
Fr. Henri Namur, ofm